La petite histoire qui explique pourquoi je détestais la couture
Jusqu’à l’âge de 20 ans, je me suis toujours tenue loin des machines à coudre. Je cousais parfois à la main non sans m’enrager contre le fil qui s’entortillait sur lui-même. Les rares fois où je me suis essayée à coudre, la machine avait vite fait de ne plus fonctionner. Aiguille cassée, « mottons » de fils, moteur qui ne tourne plus, machine désenfilée, j’avais toujours à subir un cocktail de mésaventures qui venaient à bout de ma motivation. En plus, c’était tellement «out» chez les jeunes de faire de la couture. « Ah bon, tu vas te faire un pyjama en flanelette?», j’avais l’impression qu’on allait me dire si je démontrais une seule once d’intérêt pour ce loisir de grands-mères.
Et une dizaine d’années plus tard, je démarre mon école de couture… Que s’est-il passé pour que je change d’avis, tu me demandes? En un mot : Nicole. Hé oui, c’est grâce à Nicole que je me suis essayée à coudre par moi-même. C’est grâce à Nicole que j’ai été envahie par l’envie soudaine et inexpliquée de coudre tout, tout le temps! C’est qui Nicole, tu me demandes? Hé bien, elle a d’abord été ma collègue de travail, ensuite (et toujours!) une amie et aussi ma proprio le temps d’un été… Le meilleur été de ma vie : je vivais au-dessus de chez elle et je pouvais à toute heure du jour (et de la nuit!) descendre d’un étage et lui poser des questions de couture!
L’importance d’avoir un bon professeur
J’espère vraiment être un jour la «Nicole» de quelqu’un. Je ne suis pas surprise d’encadrer mes étudiants de la même façon que je l’ai été avec elle. Premièrement, elle croyait en mon potentiel : je pouvais tout coudre! Même si parfois je m’attaquais à un projet très ambitieux pour mon niveau de couture (comme un kit veston-tailleur!), elle m’encourageait à m’essayer tout de même. «Apprendre à coudre, c’est découdre souvent», me disait-elle avec le sourire. Deuxièmement, elle me faisait essayer toutes sortes de machines (industrielle, surjeteuse, etc...), ce qui m’a rapidement permis de me libérer de ma peur des machines à coudre. J’ai surtout compris que je n’avais pas besoin de comprendre toutes les fonctions de ma machine par cœur pour pouvoir faire mes projets. C’est à cela que sert le manuel d’instruction, non? Troisièmement, Nicole m’encourageait à sortir des sentiers battus. Car elle n’est pas le genre de couturière à fabriquer les 2 ou 3 mêmes projets depuis plus de vingt ans! Des recouvres-théières aux costumes de scène, son atelier déborde de créations, toutes plus «Burtoniesque» les unes que les autres (comme les films de Tim Burton! Je viens d’inventer ce mot, car le mélange de passion/imagination/créativité débordante de Nicole ne se décrit pas avec les mots du dictionnaire). Enfin, avec elle, je me suis toujours sentie comme étant autonome (malgré mes mille et une questions!) et libre de créer ce que je voulais, comme je le voulais. Le tout dans une ambiance à la fois détendue et franchement rigolote!
Apprendre à « sauver » ses projets
Faites ce que je dis et non ce que j’ai fait. En couture, ce que je détestais aussi, c’est que tu ne peux pas recoller ton tissu avec du scotch tape si tu le coupes tout croche. Un coup de ciseaux mal fait et c’est fini. Je me souviens qu’à mes débuts en couture, le fusil à colle chaude n’était jamais bien loin. Mes «confections» étaient encore un mélange entre les arts plastiques et la couture. Lorsque j’ai fait réellement le saut (et rangé la colle chaude!), c’est lorsque je me suis décidée à fabriquer un vêtement. Et pas n’importe quel vêtement : ma première création sur-mesure allait être un costume historique des années 1900 que j’allais en plus porter au travail. Hé oui, j’ai travaillé pendant deux étés pour un centre culturel et je faisais des visites guidées, vêtue d’une robe de l’ancien temps. C’est justement là que j’ai rencontré Nicole…Pour faire une histoire courte, je me suis mesurée et j’ai découpé la grandeur du patron selon mes mesures. J’ai coupé le tissu et cousu tout le costume de A à Z (les rubans, les boutons, les froufrous, le col, etc.) sans même l’essayer une seule fois! Et je me suis retrouvée, après des semaines de travail, avec un vêtement trop petit! C’est là que j’ai appris à «sauver» mes projets grâce à Nicole qui m’a suggéré de fabriquer un tablier pour cacher l’ouverture que mon costume trop petit laissait apparaître sur le devant.
Expérimenter… malgré tout
Si tu savais le nombre de projets ratés ou inachevés qui ont traversé ma route et qui m’ont permis d’acquérir une solide base en couture! Je passe toujours à travers les mêmes montagnes russes d’émotions quand je crée un nouveau projet : tout d’abord, je suis très (mais alors TRÈS!) enthousiaste de commencer un nouveau projet; ensuite je commence à serrer des dents lorsque le premier essai ne fonctionne pas et que je ne comprends pas pourquoi. La frustration monte d’un cran lorsque les 2e et 3e essais sont des échecs lamentables. J’apprends enfin de mes erreurs et peaufine le projet. Enfin, c’est la libération et la victoire : j’ai réussi et je tiens dans mes mains le plus BEAU PROJET du monde! Avec la pratique et les années, j’ai appris à créer avec cette courbe d’émotions qui passe rapidement du haut vers le bas et du bas vers le haut. L’important, c’est surtout de ne pas se décourager et de persévérer jusqu’à ce qu’on réussisse.
3 qualités pour réussir en couture
#HUMILITÉ – Je me souviens de mon premier cours de couture : c’était dans une école située dans le Mont-Royal à Montréal. J’étais teeeellllleeeement excitée à l’idée de devenir en quelques heures une vraie Coco Chanel! J’allais tout apprendre ultra vite et maîtriser toutes les techniques sans efforts, c’est certain! Je suis arrivée sur place avec mon attitude d’étudiante qui obtient des A+ à la pelletée et qui sait tout. J’étais tout le temps en conflit dans mon cerveau, car je pensais que ma technique était la meilleure. Sans grande surprise, ça n’a pas donné grands résultats ce matin-là! Dès le cours suivant, j’ai adopté une attitude un peu plus humble (c’était clair que je ne savais pas tout!) et j’ai progressé rapidement par la suite. Mon conseil : rester ouvert(e) à ce que les autres couturiers(ères) peuvent nous apporter. Il n’y a pas qu’une seule façon de coudre : tu peux toujours apprendre (et réapprendre!) des autres.
#RÉSILIENCE – Pendant un été, alors que j’étudiais à l’université et que je venais tout juste de terminer mon premier cours de couture, j’ai travaillé comme opératrice de machine à coudre pour une manufacture de vêtements de sport. Je faisais les bords de manches des chandails de hockey durant 8 heures tous les jours. Juste les bords de manches. Pas le reste du vêtement (eh non!), seulement les bords de manches… (soupir) Après 2 semaines à faire la même étape sans arrêt, je peux te dire que j’avais appris non seulement à réparer ma machine lorsque celle-ci faisait défaut, mais même à compter à l’envers les minutes qui me séparaient de la fin de l’été. Je lève mon chapeau (bien haut!) à toutes les couturiers et couturières. C’est un métier qui demande de la discipline, une minutie sans bon sens et une force de caractère hors du commun pour répéter les mêmes étapes de confection plusieurs centaines de fois. Mon conseil : respirer et être patient(e) vont t’aider à réaliser tes projets les plus fous! Mes 1 001 bords de manches m’ont quand même amené l’année suivante à retourner au cégep pour faire un DEC en Design de mode…
#CONFIANCE – À mes débuts, comme je te l’expliquais dans l’intro, j’étais complètement dépassée (et frustrée!) par la couture. Lorsque j’ai commencé à m’y intéressée, je n’avais presque pas (ou très peu) de connaissances techniques. Je me trouvais très poche et mes projets étaient très laids. Après avoir rencontré Nicole (il y a vraiment un Avant et Après Nicole!), ma première réussite a été de fabriquer une sacoche à bandoulière à partir d’une jupe. J’avais même cousu une doublure, pis toute! Et bien, quelques mois plus tard, j’ai vendu ladite sacoche dans un marché! Mon conseil : aie confiance en tes talents et n’hésite pas à montrer tes créations à ton entourage. Je te JURE que tes erreurs de couture qui t’apparaissent GROSSES de même (là j’étends mes bras de chaque côté) ne sont presque pas visibles pour Monsieur ou Madame tout le monde.